Chez André Dubreuil : son cri du coeur "Je hais le minimalisme !"

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On a dans l'oeil la fameuse "Spine Chair" d'André Dubreuil, exposée aujourd'hui dans les musées d'art décoratif. C'est au fond du Périgord vert, au sein de la propriété familiale, que résidait cet artiste inclassable, dans une ancienne palombière muée en habitat. Loin du tumulte parisien et du Rebel London de sa jeunesse, il y avait ancré son atelier où, avec son équipe, il ciselait, jusqu'au printemps dernier, ses créations aussi baroques qu'atypiques.

Terres fraîchement labourées, rouvraies mêlées de châtaigniers et fermes modestes disséminées : c'est dans ces paysages agricoles qu'André Dubreuil, designer onirique et artiste iconoclaste, avait fixé ses pénates. Après vingt-cinq années à Londres, dans le milieu underground, entre Mark Brazier-Jones, Tom Dixon, Ron Arad et quelques autres du même métal ; après avoir tordu le béton, trituré la ferraille et créé des pièces décoiffantes, des chaises en forme de coquille et des suspensions épineuses ; après avoir écumé les joyeusetés parisiennes, le créateur de la légendaire "Spine Chair" ressent l'appel de sa terre. Il s'installe en Aquitaine, dans sa demeure de famille.
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agrandir La maison d'André Dubreuil, où vivre au vert

1 - La maison d'André Dubreuil, où vivre au vert - "En 1999, la tempête ravage notre parc. Peupliers, chênes, châtaigniers sont au sol, mutilés, arrachés : un désastre", constate notre homme. Qu'à cela ne tienne, une vieille bâtisse utilisée en palombière réside sur la propriété. Avec son ami architecte Pierre Chrétien, l'artiste décide d'utiliser toutes ces essences de bois pour se construire une maxi-cabane d'habitation dans ladite palombière. "Mon atelier était en face, j'allais être à pied d'oeuvre. Passer de la maison de bois à l'atelier du fer, ça me plaisait." La formation de son équipe ? Des figures d'ici : anciens carrossiers, soudeurs ou encore plombiers, initiés par lui au maniement de la matière qu'elle soit brute ou précieuse, l'un ne contredisant pas l'autre à l'atelier.
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En photo : la maison d'André Dubreuil, une ancienne palombière aménagée en habitation. Au premier plan, mobile créé par l'artiste.

Jean-Marc Palisse

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2 - Du vert Chlorophylle en cuisine - "J'ai deux amours, l'Afrique et la Chine. Pardon, trois, avec le XVIIIe français pour son sens de l'harmonie, sa justesse des proportions, son goût de la symétrie..." À l'aise dans sa profusion de porcelaines chinoises et de statuettes africaines, notre collectionneur impénitent peut s'honorer de commandes prestigieuses, qu'il crée à son rythme - plutôt lent - et selon sa fantaisie. "Mes clients me donnent carte blanche, ils ne savent pas ce que je vais leur réaliser, moi non plus d'ailleurs." De Peter Marino pour Dior, Tiffany (à New York) ou l'hôtel Cheval Blanc à la fameuse galeriste chinoise Pearl Lam... mais aussi quelques happy few et nombre d'amateurs avertis. "Je demande juste une photo de l'endroit où sera placé le meuble, la dimension du panneau et s'ils souhaitent une console, un guéridon et... ils attendent !" Ainsi, dans l'intensité du fer battu, du bronze scarifié et du cuivre gravé naissent des pièces improbables ornées de cristal de roche et d'émaux, parées comme des joyaux, véritable exaltation de l'ornement.
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En photo : la cuisine, en Corian vert, Gaggenau, couleur favorite du propriétaire des lieux. Hommage à la Chine avec une paire de fauteuils XIXe du Shanxi, collection de plats et de bols à riz blanc-bleu. Au fond, parmi divers objets usuels sinisants, obélisque en biscuit de Sèvres et pendule "Atmos", Jaeger-Lecoultre, 1928, surmontée d'une tête africaine. De part et d'autre, une photo du Grand Palais en travaux et une oeuvre d'un artiste coréen. Au centre, sous la suspension d'André Dubreuil, cruche en argent, coupe et bol à riz chinois.
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Jean-Marc Palisse

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3 - Détails de la cuisine - Contre la photo des verrières du Grand Palais en travaux due à Abadie, cruche en argent massif avec patine brune, signée Paul Belvoir, 1990.

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4 - Repaire d'artiste - De cette ébullition créative et poétique surgissent paravents, luminaires ou sièges de haute facture décorative : un style indéfinissable qui remporte l'adhésion de ceux qui goûtent l'exceptionnel et la pièce unique. Où l'on saisit sans peine le cri du coeur d'André Dubreuil : "Je hais le minimalisme !"
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En photo : le salon et sa verrière créée façon cathédrale.

Jean-Marc Palisse

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5 - André Dubreuil et ses chaises "Paris" en métal oxydé - À l'heure où les années 1980 font leur retour, leur plus emblématique représentant va nous manquer. Parti au printemps dernier, il venait de terminer un meuble d'appui, genre de coffre-fort aussi massif que menaçant. Présenté par sa galeriste Gladys Mougin - associée et amie - au dernier Paris Art + Design (PAD) des Tuileries, il le nomma "Le Tank". Vocable prémonitoire en ces temps guerriers ou autodérision dont il était coutumier ? Il ne nous le dira plus.
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En photo : André Dubreuil et ses chaises "Paris" en métal oxydé, création pour une exposition à la Galerie Yves Gastou en 1988. En fond, boiserie sculptée d'une scène africaine de débardage.

Jean-Marc Palisse

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6 - Une pendule création d'André Dubreuil - Sous une glace de style rocaille allemande, une pendule, création d'André Dubreuil, entourée de bibelots japonais, persans et chinois.

Jean-Marc Palisse

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7 - Créations d'André Dubreuil - Peinture à l'huile "croco", Afrique, années 1950, lampe, création André Dubreuil, 1989, et son reflet dans le miroir, écran de lettré chinois en pierre, boîte en laque japonaise et statuette africaine.

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8 - L'Afrique au coeur - Tabouret africain, de même que la grande statue et la natte en raphia près de la fenêtre. Maxi-canapé à capitons en velours de soie bleu paon griffé Jacques Grange, garni de coussins en patchwork rebrodés par la soeur du designer et surmonté d'une peinture indienne signée Venkanna, achetée à Bombay. Table basse à plateau en cuivre iranien et piètement réalisé par André Dubreuil, comme le photophore "Perles", 1987, en bronze et billes de verre.

Jean-Marc Palisse

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9 - L'iconique "Spine Chair", 1986, version miniature éditée par Vitra - sur le livre Poète du fer, de Jean-Louis Gaillemin, éditions Norma.

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10 - Côté petit salon, collection de chinoiseries dans la bibliothèque - de même provenance, comme le paravent en laque. Le tabouret en tôle noire d'André Dubreuil supporte un grand bol à riz chinois et jouxte la banquette Louis XV, qui fait face au fauteuil en tapisserie de la même époque. Paire de coussins chinois, l'un ethnique, l'autre gainé d'une soierie ancienne.

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11 - Raffinement et simplicité - Côté petit salon, banquette Louis XV et fauteuil en tapisserie de la même époque, garnis de coussins chinois ethniques et gainés de soieries anciennes, contre le calorifère. Collection de chinoiseries dans la bibliothèque de même provenance, face au pouf marocain en cuir. Le tabouret en tôle noire, d'André Dubreuil, supporte un grand bol à riz chinois. Au fond, miroir sorcière entre une paire d'appliques en cuivre argenté du designer, sous une acrylique sur papier en ton fuchsia.

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12 - L'ex-palombière a gardé intacte sa tourelle d'affût - .

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agrandir Le mobile, réalisé par André Dubreuil

13 - Le mobile, réalisé par André Dubreuil - aligne son fer de lance et sa lentille de verre sur l'horizon agreste. La stèle de récupération est surmontée d'une pierre sommitale érodée par les eaux, débusquée dans les bois voisins.

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14 - Chaise basse chinoise et photo en noir et blanc d'un musicien africain - contre les boiseries et sur le parquet de récupération issus des bois de la propriété dévastés par la tempête de 1999.

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15 - Dans l'entrée, un panneau originaire de Côte d'Ivoire - années 1950, a été monté en porte coulissante. En bois sculpté, il figure, une scène de débardage de bois en forêt. En cimaise, masques africains et saynètes naïves représentant des animaux et les travaux des champs. Au sol, triptyque de plateaux en cuivre et laiton ciselé, originaires de Perse, d'Égypte et d'Iran. Statuette africaine sur repose-pieds chinois. Au plafond, suspension en fer forgé, bronze et perles de verre d'André Dubreuil, 1989.

Jean-Marc Palisse

agrandir Le choix du bois pour la maison d'André Dubreuil

16 - Le choix du bois pour la maison d'André Dubreuil - Dans la galerie qui mène au salon, vue sur la chambre à gauche, avec son imposte à clairevoie réalisée en bois, à Shanghai. Côté droit, plats chinois blanc-bleu. Côté gauche, bâtons de chaman tibétains, pierre de rêve du Yunnan, statuettes et masques africains contre l'armoire lyonnaise XVIIIe. Au premier plan, suspension signée André Dubreuil.

Jean-Marc Palisse

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17 - Dans la chambre, sous le rampant de bois blond, petite chaise africaine - en bois foncé, et au fond, bronze de Vadim Androusov, années 1940. Grand plat mural réalisé par André Dubreuil et huile de l'artiste contemporaine Regina Gimenez figurant quatre orbes.

Jean-Marc Palisse

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18 - Au sein de l'atelier tout proche de sa maison - André Dubreuil, avec son équipe, bat le fer quand il est chaud. C'est dans cet antre de Vulcain, habité d'une armada d'instruments et d'outils de toutes sortes, plus abrasifs et contondants les uns que les autres, que naissent ses précieuses créations sophistiquées.

Jean-Marc Palisse

agrandir Détail d'un grand panneau ajouré baptisé "La Porte de l'Inde"

19 - Détail d'un grand panneau ajouré baptisé "La Porte de l'Inde" - réalisation composite en fer forgé, bronze patiné, acier perforé, cuivre ciselé, cristal de roche en son centre et feuillage émaillé sur le pourtour.

Jean-Marc Palisse

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