Née de façon spontanée à l'issue de la dernière édition de Paris Design Week, elle réunit des designers âgés de 25 à 35 ans, aux profils et aux parcours divers. Regroupés en deux équipes, ils vont s'affronter lors d'une compétition placée sous le signe de la création. Rendez-vous au Carrousel du Louvre, sous la Pyramide inversée.
Le designer Piergil Fourquié a eu l'idée de la Fédération française du design (FFD), puis de la battle "Bois noir vs Bois blanc", au lendemain du discours d'Arnaud Montebourg, lors de la deuxième édition de Paris Design Week. Le ministre du Redressement productif évoque l'idée d'une "équipe de France du design". Le designer parisien Piergil Fourquié, 33 ans, diplômé de l'Ensaama (Olivier-de-Serres) et du Birmingham Institute of Art and Design, décide de réagir. Et d'agir. "Dans les propos du ministre, une équipe de France du design, c'était une dizaine de personnes. Je trouvais cela trop réducteur." Il fonde alors la Fédération française du design. "Je souhaitais, explique Piergil Fourquié, rassembler des designers de diverses générations, de formations différentes, travaillant en agence ou free lance... Bref, un groupe qui représente toutes les facettes possibles de la discipline." Pari réussi. Son mouvement prend vite de l'ampleur : il est repéré, intégré dans cette troisième édition de Paris Design Week et est à l'origine d'un concours très original.
"Au départ, nous voulions rester dans l'idée d'un manifeste pour informer, nous positionner. Mais c'était compliqué. Nous avons donc pensé à une bataille, opposant deux équipes de dix designers sur le thème du bois : bois noir et bois blanc." Pourquoi le bois ? "Parce que c'est un matériau que l'on produit en France et qui n'est pas trop cher à travailler pour les jeunes designers." Et le noir et le blanc ? "Pour illustrer la confrontation, la partie d'échecs."
Le design pour relancer la compétitivité.
"Le design doit faire partie de la stratégie industrielle de la France." C'est Fleur Pellerin qui le dit. Présente aux côtés d'Arnaud Montebourg au Lieu du Design le 10 septembre 2012, la ministre déléguée auprès du ministre du Redressement productif, chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique, a ajouté que "le design a une place très importante à occuper pour relancer la compétitivité". "Toutes les réflexions sur l'innovation technologique, sociologique, par les usages, montrent qu'il y a beaucoup à gagner à intégrer le design dès la conception des produits."
Un match, deux équipes
Au Carrousel du Louvre, l'équipe blanche va affronter l'équipe noire durant toute une semaine. Retour sur les forces en présence et les projets défendus par chacune d'elles. Elles vont se défier comme deux équipes adverses d'un sport collectif. Non pas sur un terrain, mais dans un espace aux allures de ring. Au carrousel du Louvre, sous la Pyramide inversée. Pas banal. D'un côté, l'équipe blanche, de l'autre, la noire. Le capitaine des blancs, le designer Pierre Dubourg, supervise également la direction artistique et le suivi technique de l'événement. À l'instar d'Élise Fauveau, designer elle aussi et capitaine de l'équipe noire. "Chaque équipe a pour objectif de développer des objets en bois qu'elle va ensuite signer de sa couleur, par l'ajout d'un autre matériau ou d'une peinture", explique Piergil Fourquié, à l'origine du projet. Une façon de marquer son territoire, de tatouer son travail, de revendiquer son savoir-faire.
Quant aux créations elles-mêmes, "ce sont des objets du quotidien, sur lesquels les designers ne sont pas toujours sollicités au moment de leur conception". Moulin à poivre, miroir, boîte à outils, portemanteau, luminaire, table d'appoint..., les exercices de style sont variés. Parmi les curiosités à ne pas manquer, citons, pour l'équipe blanche, le drôle de moulin en bois et papier "Aüra", imaginé par Jacopo Ferrari. Il s'agit d'un ventilateur de table, alimenté par une prise USB. Et, chez les noirs, une coupe en hêtre et marbre - noir, bien sûr ! -, réalisée par le designer Charles Seuleusian. Son travail confronte habilement deux matières, deux couleurs, deux sensations au toucher. Un contraste souligné par l'assemblage des deux parties de la coupe : en effet, le volume se dessine et se verrouille par un simple jeu d'encastrement. Deux exemples qui en disent déjà long sur la qualité des objets en compétition. Signalons encore que ces créations seront posées et exposées dans une scénographie signée Quentin Simonin. Ce designer, âgé de 25 ans, a notamment participé à la scénographie de la rétrospective consacrée aux 30 ans de l'Ensci-Les Ateliers, en mars dernier au Lieu du Design.
Un concours qui a de l'avenir
La Fédération française de design aimerait réitérer sa première battle. À Paris bien sûr, mais aussi dans d'autres villes françaises, voire à l'étranger. "Nous aimerions faire tourner ailleurs le ring, les objets, les designers, la battle." Piergil Fourquié y pense sérieusement. "Nous pourrions rebondir avec un autre matériau que le bois. Nous pourrions aussi demander à des Italiens, des Allemands, des Japonais... de créer leur propre fédération de design, afin de tous nous affronter, à Milan par exemple." Les idées ne manquent pas. Reste à trouver des partenaires, des soutiens financiers, sans pour autant y perdre son âme. "Nous essayons de rester autonomes, afin de garder le plus de marge de manoeuvre possible", confie Piergil Fourquié. C'est en solitaire puis fort de la FFD qu'il a réussi à transformer l'essai d'Arnaud Montebourg. À savoir mêler design et politique. Mais tenter aussi de sortir les designers de l'image "d'acteurs sollicités juste pour mettre un peu de couleur sur tel ou tel objet, dans tel ou tel projet". Un cliché qui leur colle trop souvent à la peau.
"Parfois, dans des dîners ou en soirée, on me demande des conseils de déco. Mais je ne suis pas architecte d'intérieur !" déplore Piergil Fourquié, qui s'agace qu'en France on confonde encore architecte, architecte d'intérieur, styliste, designer... "Et bon nombre d'émissions de télévision n'arrangent rien à cette confusion." Agitateur, créateur, meneur, il est un peu tout cela à la fois. Un positionnement de touche-à-tout qui a le mérite d'éveiller, de réveiller. Piergil Fourquié a su prendre au mot Arnaud Montebourg. Parviendra-t-il à doper la FFD ? À pérenniser la battle ? À décrocher d'autres soutiens ? De nouveaux partenariats ? Pour l'heure, il garde son sens de l'humour : durant Paris Design Week, il posera avec les membres des équipes blanche et noire, à la manière de joueurs de football ou de tennismen. Car la battle, comme le sport, est avant tout un jeu, et l'important, c'est de participer.
Pour voter, cliquez !
Parce que les consignes de sécurité sont drastiques au Louvre, impossible d'installer une urne pour collecter tous les bulletins de vote du public. Pour soutenir l'équipe blanche ou la noire, il faut donc voter sur le Net. www.parisdesignweek.fr
Protection des créations.
En marge de Paris Design Week, le Lieu du Design propose de tout savoir sur "les meilleurs outils pour protéger et défendre des créations", le jeudi 3 octobre 2013 de 9 h 30 à midi. Une formation qui s'adresse aux entreprises comme aux designers. Renseignements au 01 40 41 51 02.
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