Hommage à un maître des couleurs naturelles par une alchimiste d'aujourd'hui

L'artiste coloriste Virginie Lagerbe est l'initiatrice d'un hommage au botaniste rouennais Louis-Alexandre Dambourney (1722-1795). De cet expert des lumières en teintures végétales naturelles, elle partage le goût d'observer les plantes, d'en respecter les rythmes pour mieux donner vie à leurs infinies possibilités.

C'est en découvrant son travail dans un ouvrage consacré à l'art de la teinture végétale que la coloriste Virginie Lagerbe a voulu mettre en lumière l'oeuvre du botaniste Louis-Alexandre Dambourney. Un homme qui réhabilita les plantes de sa région dans l'industrie de la teinture naturelle au XVIIIe siècle, époque où la demande en colorants pour toiles imprimées était forte. Dans son jardin d'Oissel, le Rouennais planta de la garance (rouge des teinturiers) sauvage locale et d'autres variétés rapportées de ses voyages. Il écrivit des ouvrages sur l'acclimatation normande de centaines de fleurs, fruits, bois racines, obtenant plus de 900 teintes dans son laboratoire.  

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Nommé intendant du jardin botanique de Rouen en 1761, Dambourney fonda, avec le chimiste Louis-Guillaume de La Folie, une manufacture de la garance à Bapeaume. En 1788, il publia un ouvrage au titre aussi long que son savoir, Recueil de procédés et d'expériences sur les teintures solides que nos végétaux indigènes communiquent aux laines et aux lainages, imprimé par ordre du gouvernement par Ph.-D. Pierres, premier imprimeur ordinaire du roi, rue Saint Jacques à Paris !  

Une fierté de la région, dont Virginie Lagerbe, qui se définit comme "alchimiste en couleurs végétales", apprécie elle aussi le désir de "collaborer avec la nature sans l'impacter".  

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Au fil des saisons, cette passionnée a constitué sa "teintothèque", sa lecture colorée des végétaux, et ouvert son atelier, Pérégreen. "Partout où l'on voit habituellement du vert, je vois d'autres tons..." Pour l'exposition qui s'est tenue au printemps dernier, "Dambourney, les couleurs des plantes indigènes", Virginie a réalisé un herbier de neuf plantes indigènes ainsi qu'une oeuvre consacrée aux trois couleurs grand teint, la gaude, la guède et la garance. "Je cherche à révéler l'âme colorée de l'univers végétal afin d'en recréer l'identité des teintes, à célébrer la nature, donner vie à ses pouvoirs pour ajouter de la poésie à l'oeuvre du monde..." Une philosophie que son ancêtre et frère en harmonies tinctoriales, qui passa sa vie à jardiner, expérimenter, transmettre, n'aurait pu qu'approuver.