Préparer la transmission de votre patrimoine est une étape cruciale pour assurer la sécurité financière de vos proches. Cette démarche facilite non seulement les formalités pour les héritiers mais réduit également les risques de conflits familiaux, tout en allégeant la fiscalité. Il est essentiel d'être bien informé des options disponibles et du processus à suivre. Les notaires et les gestionnaires d'épargne sont les experts à consulter pour naviguer avec succès dans cette opération délicate. Selon une étude récente, pas moins de 83 % des Français estiment avoir besoin de l'aide d'un professionnel lors d'une transmission de patrimoine ! En continuant votre lecture, découvrez les étapes essentielles pour une transmission de patrimoine réussie et comment éviter les pièges courants.
Se projeter sur la question de quoi transmettre et comment après mon départ de ce Monde est une question essentielle pour tous ceux qui souhaitent être les acteurs responsables de leur patrimoine. Il est impératif de faire les meilleurs calculs afin d'optimiser la transmission de ses biens. En élaborant une stratégie en amont, on évite aux descendants d'être pris au dépourvu et de devoir prendre des décisions hâtives, telles que la vente bradée d'un bien immobilier pour couvrir les droits de succession imposés par l'État. Il est important de noter que ce délai est généralement de six mois après le décès du parent.
Définir au préalable, à travers un pacte de famille, la répartition des biens permet de limiter les risques de conflit familial et de favoriser une transmission sereine. La collaboration avec un notaire s'avère être un choix judicieux, car elle garantit une approche réfléchie et globale. Cette démarche permet non seulement d'éviter des actions dispersées mais aussi de fixer des objectifs qui offrent une vision à long terme.
En explorant les détails de ces étapes essentielles, vous serez mieux préparé à anticiper les défis potentiels liés à la transmission de votre patrimoine et à assurer sa continuité de manière éclairée et planifiée.
La transmission de patrimoine : pour la paix des familles et une taxation juste
Selon une enquête nationale réalisée par le gérant d'épargne Yomoni en 2023, plus de 83 % des Français interrogés ont déjà réfléchi à la manière de transmettre leur patrimoine. Cependant, parmi eux, 32 % estiment ne pas avoir de patrimoine à léguer, et 16 % se sentent démunis quant à la marche à suivre. De plus, 86 % des participants à l'enquête admettent que la transmission de patrimoine est un sujet tabou au sein de leur famille.
"La transmission est un sujet compliqué car il induit que la personne se projette dans sa propre mort, ce qui représente un frein psychologique, introduit Charlotte Thameur, DRH de Yomoni. Bien que l'optimisation fiscale puisse être une motivation, dans 50 % des cas en France, cette possibilité n'existe pas. Alors, pourquoi ceux qui n'ont pas de fiscalité à gérer devraient-ils s'occuper de la transmission de patrimoine ? Pour la paix des familles ! En effet, lors du décès d'un proche, il est nécessaire de s'occuper des tâches à accomplir malgré l'émotion intense. Anticiper la transmission de son vivant concerne divers aspects, allant de l'organisation des obsèques à la planification des dons aux enfants ou aux neveux, tout en assurant la protection du conjoint. Cela permet de vivre ces moments douloureux plus sereinement. Cette organisation reste valable qu'il y ait beaucoup de patrimoine ou non, et qu'il y ait une fiscalité à gérer ou non."
Maître Yoline Ganem-Cohen et Maître Nathanaëlle Ayeva-Derman, notaires à l'Étude Strock & Associés, abordent ces questions quotidiennement dès les premières étapes de la vie d'adulte. "Nous évoquons ces sujets dès la signature du contrat de mariage ou d'un contrat PACS en abordant les régimes matrimoniaux, et au moment de l'acquisition et de la vente d'un bien... Le but est de se protéger personnellement et entre époux, de protéger sa famille, d'assurer son train de vie et même de prévoir sa retraite en trouvant des solutions permettant de transmettre sans se démunir, afin d'assurer sereinement les suites de sa vie sans avoir à dépendre des enfants."
Avant la fiscalité, la partie administrative
Avant même d'aborder la gestion financière ou immobilière, anticiper la gestion administrative et éclaircir les zones d'ombre en amont, grâce à une communication efficace avec ses héritiers, est la clé pour simplifier leur vie future. Cette étape administrative cruciale englobe divers aspects, dont l'organisation des obsèques. Charlotte Thameur recommande d'introduire le concept américain connu sous le nom de 'boîte rose' du coach Tom Cuthbert : "Il s'agit de mettre dans un coffre, une boîte avec un document expliquant toutes vos dispositions, ainsi que tous les documents administratifs à régler au moment du décès. D'y inscrire vos dernières volontés, et même d'indiquer des indications telles que par exemple : 'Pensez à résilier tel abonnement', vraiment pour faciliter la suite pour ceux qui restent en vie. Je trouve que c'est une inspiration intéressante."
En prenant soin de ces détails administratifs, non seulement vous vous assurez que vos souhaits sont respectés, mais vous offrez également à vos proches un guide pratique pour gérer les aspects pratiques qui suivent le décès. Cette approche proactive contribue à alléger le fardeau émotionnel et financier qui accompagne souvent la perte d'un être cher.
Optimiser la transmission pour éviter la fiscalité
D'un point de vue légal, deux options s'offrent à vous pour organiser votre succession : le faire de votre vivant ou, une fois décédé, par le biais d'un testament. Traditionnellement, c'était la deuxième option qui prévalait. "L'essentiel jusqu'alors était de ne pas coûter d'argent à ses descendants, expliquent les expertes. Cependant, le contexte d'extrême vieillesse change la donne, et les modes de transmission évoluent : nous sommes passés de l'idée de 'ne pas transmettre de dettes' à 'transmettre de l'argent à ses descendants'."
Lorsqu'une personne décède, le notaire et la famille rassemblent sa masse successorale et déterminent les héritiers. À cette étape, les questions cruciales sont les suivantes : Comment souhaitez-vous organiser la succession avec vos enfants, et êtes-vous vraiment préoccupé par le frottement fiscal successoral ? Avec un patrimoine simple sans frottement fiscal, l'essentiel à organiser concerne la partie administrative mentionnée précédemment, ou la gestion des biens personnels. En revanche, s'il y a un impact fiscal, l'objectif est d'optimiser la transmission en l'anticipant, principalement pour en diminuer le coût et éviter que les héritiers ne soient confrontés à des difficultés financières à la suite du décès.
Le notaire est le référent par excellence, car il reste objectif et n'a aucun intérêt financier dans la vente de placements. Son point de vue est purement légal, différent de celui du banquier. Il dresse un bilan de droit et offre des conseils juridiques sur les règles en vigueur et les placements envisageables, afin de définir le schéma successoral le plus cohérent et approprié en fonction de la configuration familiale et du patrimoine, qu'il s'agisse d'immobilier, d'usufruit, de liquidités, d'oeuvres d'art, d'entreprise, ou d'autres biens.
Donner de son vivant : à privilégier
"La donation de son vivant est de plus en plus considérée de nos jours, reconnaît Charlotte Thameur. C'est la solution première pour se déposséder d'une partie de son patrimoine, éviter la fiscalité tout en aidant ses proches, et réduire les droits de succession. Toutefois, il s'agit d'une option généralement privilégiée par les familles les plus fortunées et/ou généreuses."
Chaque parent a la possibilité de donner à chaque enfant une valeur de 100 000 euros, que ce soit sous forme immobilière, numéraire, ou de parts de société. En plus de cet abattement, chaque parent (âgé de moins de 80 ans) peut faire don à chaque enfant majeur d'une somme d'argent atteignant 31 865 euros. Ces abattements ne peuvent être utilisés que tous les 15 ans. Le démembrement de propriété se présente comme un excellent outil pour optimiser cette transmission. Il permet de déduire de l'assiette taxable la valeur de l'usufruit du donateur, cet usufruit étant valorisé en fonction de son âge, où plus le donateur est jeune, plus l'usufruit est fort.
Prenons un exemple concret : Une personne de 69 ans souhaite faire une donation à son fils portant sur la nue-propriété d'un appartement d'une valeur de 400 000 euros. À 69 ans, l'usufruit vaut 40%, les droits sont donc calculés sur 400 000 euros - 40%, soit sur 240 000 euros. Ensuite, on applique l'abattement de 100 000 euros, ce qui réduit l'assiette taxable à 160 000 euros.
Si ce même bien était transmis à la même valeur à cet enfant par décès, les droits seraient calculés sur la totalité de 400 000 euros, générant une économie d'assiette de droits de 160 000 euros (correspondant à la valeur de l'usufruit dans l'exemple ci-dessus).
De plus, chaque grand-parent a la possibilité de donner à chacun de ses petits-enfants une somme de 31 865 euros, indépendamment de l'âge des grands-parents et des petits-enfants. Bien que cet abattement numéraire soit du même montant que l'abattement susmentionné pour les parents (moins de 80 ans) et les enfants (plus de 18 ans), il s'agit de deux abattements distincts qui peuvent se cumuler dans le cas des grands-parents/petits-enfants. À noter : l'abattement en numéraire de 31 865 euros s'applique également au profit des neveux en l'absence d'enfants du donateur.
En présence de plusieurs enfants, il est recommandé d'établir une donation-partage entre tous les enfants plutôt que plusieurs donations individuelles. Le principal avantage de la donation-partage est de figer les valeurs entre les enfants, peu importe la fluctuation de la valeur de chaque bien entre la donation-partage et le décès. En d'autres termes, à une date donnée, le parent donateur considère avoir donné des biens de valeur équivalente à chacun de ses enfants, indépendamment des variations ultérieures. Cette approche permet d'éviter toute discussion potentielle lors de la succession.
"Avant de se lancer dans une donation de son vivant, il est essentiel de s'assurer d'avoir les moyens de bien vivre jusqu'à ses vieux jours en se posant des questions sur la dépendance, comme : Pourrai-je encore vivre chez moi ? Qui gérera pour moi demain si je deviens incapable ? Qui me représentera, et dois-je établir un mandat de protection future ?", rappelle Maître Yoline Ganem-Cohen. Ce mandat peut être établi soit par acte notarié, soit via un acte sous seing (sous signature) privé, offrant plus de pouvoirs au mandataire que l'acte sous seing privé.
Optimiser la transmission de son patrimoine : aller plus loin
À ce stade, une grande étape est déjà franchie, mais il existe d'autres possibilités à considérer pour optimiser la gestion de votre patrimoine. L'assurance vie, par exemple, offre des avantages considérables, notamment un abattement de 152 500 euros par bénéficiaire pour les sommes versées avant les 70 ans du donateur. D'autres options comprennent le démembrement de propriété, le compte-titres (qu'il soit financier ou immobilier), la donation au dernier vivant, sans oublier la possibilité d'aménager son régime matrimonial. Il est crucial de se poser des questions sur la situation de couple, le rééquilibrage des patrimoines entre les conjoints, et de définir précisément le périmètre de protection de son conjoint ou partenaire.
"La transmission (donation) en démembrement de propriété permet de conserver l'usufruit du bien tout en préservant son cadre de vie, précise Charlotte Thameur. Cependant, il est essentiel de garder à l'esprit qu'en cas de vente du bien de votre vivant, toutes les parties - donateurs et donataires - doivent consentir à la vente. Il est préférable de privilégier ce type de donation pour tous les biens qui ne sont pas la résidence principale, afin de maintenir son autonomie."
Comme vous l'avez compris, anticiper est la clé d'une gestion optimale de votre patrimoine. Cela vous permet de rester maître de votre patrimoine et de décider de ce qui vous semble le plus juste. De plus, commencer à faire une donation assez jeune, à l'âge de 55 ans par exemple, pourrait vous donner la possibilité de réitérer l'opération à 70 ans (avec un écart de 15 ans) voire de transmettre à la génération de vos petits-enfants. Ce processus réfléchi et planifié offre une flexibilité et une continuité dans la transmission de votre patrimoine, en vous permettant de l'adapter aux évolutions de votre vie et de votre famille.
Remerciements à Charlotte Thameur, Directrice Conseil de Yomoni, 1er gérant d'épargne en ligne depuis 2015 ; à Maître Yoline Ganem-Cohen et Maître Nathanaëlle Ayeva-Derman, toutes les deux notaires spécialisées en droit de la famille et gestion de patrimoines à l'Étude Strock&Associés