Les changements de saisons modifient tout naturellement le profil du jardin qui, s'il n'y est pas bien préparé, peut toutefois en sortir fragilisé. À l'approche de l'automne-hiver, quelques gestes simples permettent d'assurer la santé des végétaux présents depuis longtemps dans le paysage comme celle des nouveaux arrivants. L'augmentation de l'humidité en fin d'été est en effet propice aux plantations. Autant dire que l'automne est une saison essentielle (pour ne pas dire la plus importante) pour les amateurs de jardinage. Grâce aux recommandations de jardiniers chevronnés, les fleurs et les légumes fraîchement plantés ne devraient plus souffrir des gelées. Encore faut-il choisir des variétés adaptées aux conditions réelles du terrain, et ce que l'on profite d'un véritable jardin ou d'un balcon végétalisé au travers de jardinières. Décryptage des meilleures attitudes à adopter aux côtés de deux passionnés.
Les jours qui raccourcissent comme la baisse progressive des températures n'ont pas uniquement un impact sur nos rythmes de vie. Le jardin est au premier plan de ces menus changements, la fin de l'été annonçant une période de régénération pour les végétaux ayant souffert de la sécheresse. C'est également celle où les jardiniers, tous niveaux confondus, mettent la main à la terre pour ajuster leurs parterres et leurs jardinières avant l'arrivée du soi-disant redouté hiver. Didier Willery, auteur et photographe de plusieurs ouvrages sur le jardinage mais aussi responsable éditorial du pôle jardin aux éditions Ulmer, et Patrick Vernuccio, créateur de contenus sur le jardinage urbain (@thefrenchiegardener) et auteur de deux livres sur le sujet, nous démontrent qu'il n'y a pourtant rien à craindre de la saison froide si celle-ci est bien préparée. De l'incontournable paillage aux choix stratégiques de végétaux, ces deux amoureux du jardinage nous transmettent leurs meilleurs conseils en prévision de l'automne-hiver.
>> À découvrir >> Réinventer son jardin
L'automne, une période d'ébullition au jardin
Marquée par une baisse progressive des températures, la fin de l'été voit surtout le taux d'humidité grimper après des périodes plus ou moins longues de sécheresse. Comme l'explique Didier Willery, toutes les conditions sont alors réunies pour permettre aux plantes de s'enraciner ou de se réenraciner dans la terre : "Si le sol est encore chaud à l'issue de plusieurs mois d'ensoleillement, il existe souvent un gros contraste dans l'air entre le jour et la nuit. Cette amplitude de températures stimule les végétaux qui synthétisent alors les hormones d'enracinement au travers de leurs feuilles. C'est pour cela qu'il est essentiel de planter lorsque le feuillage est encore sain. D'une manière générale, la végétation a plus de chances de survivre au froid mais aussi à la sécheresse suivante si ses racines sont bien développées en amont". Devenu expert en matière de jardinage à force d'expérimentations, l'auteur et responsable éditorial conseille par exemple de planter des plants de fraises dès l'automne, afin qu'ils s'enracinent avant l'arrivée du printemps, de plus en plus chaud et sec. Les différentes actions menées pendant cette période charnière ayant aussi pour vocation de préparer le jardin à la "belle" saison.
L'auteur Patrick Vernuccio, connu sous le pseudonyme de Frenchie Gardener, avoue quant à lui avoir "complètement raté" son premier automne parce qu'il ne l'avait pas suffisamment anticipé. Tombé amoureux du jardinage alors que rien ne l'y prédestinait, il a fait ses armes seul, en multipliant les plantations sur son balcon de ville. "Il est tout à fait possible d'organiser des rotations si l'on prévoit dès septembre des végétaux qui arrivent à maturité durant l'automne ou au début de l'hiver. L'été qui touche à sa fin n'est pas forcément synonyme de jardinières en sommeil, il suffit de choisir des fleurs ou des légumes adaptés aux conditions climatiques pour les voir mûrir dans les mois qui suivent". Certains végétaux peuvent également persister dans le paysage d'une saison à l'autre, à condition de tailler ceux qui en ont besoin avant que leurs feuilles ne tombent ou ils risquent d'être plus exposés aux maladies automnales (les hormones de cicatrisation se trouvant également dans le feuillage).
>> À lire également >> Plantations d'automne : nos conseils pour un jardin au top
Quels végétaux planter avant la saison froide ?
Si la grande majorité des plantes commercialisées sont rustiques, il convient de les choisir en fonction du climat ambiant. Les agrumes sont évidemment moins exposés au froid et au gel avec le dérèglement climatique, mais restent tout de même taillés pour des régions chaudes. Faire preuve de bon sens permet souvent d'éviter les écueils en jardinage. Nos deux jardiniers soulignent ainsi l'importance de différencier dès le début les vivaces des annuelles. Les unes subsistent à l'hiver sous forme de bulbe ou de tubercule avant de réapparaître, les autres non, ce qui implique de les changer chaque année. La meilleure option reste d'investir dans des graines paysannes reproductives qui n'auront aucun mal à se développer d'une saison à l'autre. À défaut, les plantes choisies en jardinerie doivent être "fraîches", et donc n'avoir subi aucun traumatisme comme la sécheresse, le stress, le gel, afin qu'elles s'enracinent facilement une fois en terre. Aussi intéressants soient-ils pour le porte-monnaie, les étals de promos sont plutôt réservés aux jardiniers expérimentés car les végétaux proposés ont déjà vécu et auront donc besoin de soins spécifiques.
Les options sont ensuite nombreuses, non seulement car la plupart des végétaux se plantent à l'automne, mais aussi parce qu'ils se déclinent en plusieurs variétés. Les adeptes de salade ne pourront qu'être ravis d'apprendre qu'il existe une laitue d'hiver à planter en septembre ou en octobre pour la savourer dès le mois de janvier. Patrick Vernuccio nous rappelle que les légumes verts s'épanouissent pendant l'automne-hiver, à l'image des épinards, ou du chou kale, dont la texture s'avère encore plus tendre après un coup de gel. "Plantée en septembre et un minimum couvert pendant les mois les plus froids, la coriandre peut également être récoltée jusqu'au printemps", ajoute ce passionné de jardinage urbain.
Didier Willery précise de son côté que nous connaissons mal certaines espèces car nous avons en tête cette fausse idée selon laquelle la nature est à l'arrêt l'hiver. Or, seuls un gel extrême ou une très forte chaleur produisent réellement cet effet. Beaucoup d'arbustes peuvent révéler leurs couleurs durant les mois les plus froids s'ils sont installés en amont, comme le mahonia, capable d'égayer les parterres de ses épis jaunes et de son parfum de muguet dès décembre.
Le paillage ou la clé de la réussite en jardinage
S'il n'y a qu'un seul principe à retenir en jardinage c'est bien celui du paillage. Tous les jardiniers expérimentés s'accordent sur l'importance de ne "jamais laisser la terre nue", en la recouvrant de préférence avec des déchets naturels. Tapisser le sol avec des feuilles mortes ou des résidus de gazon permet de le protéger des intempéries mais aussi de le nourrir : "le plus dur dans le jardinage est peut-être de s'affranchir des pratiques encore très ancrées mais qui ne s'avèrent pas toujours adaptées à la végétation, explique Didier Willery. Au-delà des plantations, le geste essentiel de l'automne reste le paillage, et si possible avec des feuilles mortes du jardin, car ainsi elles redonnent à la terre les nutriments qu'elles lui ont pris auparavant pour se développer. La nature s'équilibre très bien seule si les conditions sont réunies". Un cycle vertueux qu'il est toutefois possible de complémenter avec des feuilles ramassées dans un sous-bois si la quantité sur place est insuffisante, notamment si l'on considère qu'il faudra entretenir cette couverture au fil des mois. Le dépouillement qui s'opère à l'automne est justement l'occasion de faire des réserves de déchets verts. Le "mulching" constitue une bonne alternative ou un complément puisqu'il revient à recycler les résidus de tonte, dont on sait rarement quoi faire, en paillage. Le conseil vaut d'ailleurs pour les jardinières qui ont autant besoin de protection et de nourriture pour créer un environnement propice à la pousse.
>> À lire aussi >> Zéro déchet au jardin : 13 pistes à suivre
Notre Frenchie Gardener précise qu'il prodigue des soins à la terre de ses contenants avant de la (re)pailler. Le volume plus restreint en jardinière ne lui permet pas de se régénérer seule ou simplement à l'aide des feuilles mortes en surface, d'où l'idée de l'enrichir avec du compost. "Lorsque mes annuelles arrivent à terme, je ratisse légèrement la terre pour retirer les racines restantes. Puis je creuse deux sillons où j'ajoute d'une part des feuilles, et d'autre part du compost obtenu avec mes déchets de cuisine (ndlr un compost bokashi) - mais cela ne veut pas dire que je délaisse la jardinière ensuite. Même avec un terreau de qualité il faut apporter régulièrement de la matière organique car les nutriments ne persistent que 6 à 8 semaines". Et quoi de mieux que l'humus pour nourrir la terre ? Au sol, cette couche fertile apparaît seule puisqu'elle résulte du travail des vers de terre. Autant dire qu'il est inutile de retourner la terre du jardin à moins de vouloir la décompacter. Les propriétaires de balcons et terrasses peuvent quant à eux se tourner vers un lombricomposteur, où piocher le précieux humus dès que nécessaire.
Quelques gestes à adopter durant l'hiver
Lorsque les températures chutent, garder un oeil sur les végétaux permet de limiter les pertes en fin de saison. Comme les pots sont faciles à déplacer, le plus simple reste de les orienter au soleil et de rentrer à l'intérieur les plus fragiles du groupe, comme les agrumes qui tolèrent mal les gelées. Patrick Vernuccio conseille également de faire hiberner les plans de poivrons et de basilic (qui sont des vivaces et non des annuelles bien que nous ayons l'habitude de les cultiver comme telles) si l'on souhaite récolter les premiers résultats au printemps. Un couvercle peut être posé sur les jardinières restées dehors, en fonction du climat. Au sol, la plupart des plantations résistent sans problème si elles sont correctement paillées, notamment car les hivers sont de moins en moins froids, mais une protection supplémentaire peut être utile pour les moins rustiques une fois passée la barre des -3 degrés. Un voile d'hivernage permet par exemple aux oliviers ou aux palmiers d'affronter le gel. Didier Willery met toutefois en garde contre l'humidité qui s'évacue moins bien avec des modèles en PVC recyclé, et peut donc entraîner un pourrissement de la plante enveloppée.
L'hiver reste une saison comme une autre pour le monde végétal. Même si les actions sont moins fréquentes, il faut tout de même surveiller le paillage et venir l'agrémenter au besoin avec les feuilles amassées pendant l'automne. Les tiges les plus sèches peuvent être taillées, avec parcimonie, entre Noël et la nouvelle année, et laissées sur place en petits morceaux pour enrichir la terre en attendant le retour du printemps. Au jardin, les périodes de grosses pluies supposent cependant de laisser le sol dégorger avant de le piétiner "ou il risque de devenir très dur et de ne plus avoir de place pour les molécules d'air". D'une manière générale, observer les plantations permet de comprendre leurs besoins - le jardinage étant également une question d'instinct selon nos deux passionnés.
>> À voir également >> Arbres fruitiers : comment s'assurer une belle récolte ?
Commentez cet article
1 commentaire
Super article! Me manque plus que ma tente et je passe tout mon temps dans le jardin.
Signaler un contenu abusif